donc moi de toute façon même si
euh même si tu penses que c'est pas intéressant je me suis enfin ce que tu as à dire je me suis rendu compte que je ne savais même pas quand tu étais arrivée à Paris comment tu étais arrivée à Paris dans quelles conditions
en fait je ne sais rien
ah bon bah écoute ça je peux te
bah ça je peux te dire bien sûr
ah c'était
on est a- on est arrivés cinquante-deux
à Paris
par le train
et
parce que la Yougoslavie il y avait des changements de
de de comment dire
c'était la le Royaume après c'est Tito qui est venu et la guerre et tous ces choses-là et on (n') avait pas suffisamment
là-bas de
liberté pour peindre parce que bon dans les beaux-arts
on travaillait mais
après il fallait qu'ils apprennent vraiment c'était fallait peindre peindre les ouvriers qui sont
ah
souriants
c'était le réalisme socialiste
oui le réalisme socialiste et nous n'avons pas
eu envie de faire ça malgré qu'on /ait, est/ pour gagner de la vie pour gagner quelque chose on nous commandait le portrait de Lénine Staline je sais pas quoi de là-bas mais après nous avons il y avait des
des bourses des gens qui à Paris et finalement nous on
après ça a commencé à se radoucir un peu
et on nous a laissés partir
sans bourse
sans
sans bourse
euh comme ça on nous a laissés partir et mais avant de partir
euh nous avons
eu
après les beaux-arts toujours eu des expositions chacun avait l'exposition et
et quelle peinture vous faisiez
euh c'est qu'on
à ce moment-là
ah on a fait la peinture classique
bah aux beaux-arts on faisait bien sûr on faisait moi j'ai surtout aimé f- j'ai fait des copies de fresques de mais pas pas comment dire
spéciales euh exactes j'ai fait assez libre j- pour moi
mais autrement on faisait la peinture à dessiner
bon mais quand même tu as appris aussi il y a un aspect d'artisan dans la peinture il y a pas que
oui oui oui oui c'est ça qu'on apprend à l'école on apprend le chose les techniques les couleurs de dessin des gens
et après après on a après nous avons travaillé
et
on voyageait quelques fois comme ça en groupe on faisait la peinture dans la nature et après on a fait chacun une exposition et Vlada a vend- vendu la une toile
à l'ambassadrice française
d'accord
et
elle a dit vous avez vous allez à Paris sûrement et on vous paiera là-bas c'est comme ça que nous sommes venus
vous aviez quel âge
euh
si vous voulez cinquante-deux
cinquante-deux ça veut dire euh je suis née vingt-deux
trente ans
ah oui dis je croyais que vous étiez venus beaucoup plus jeunes
non vous étiez déjà des artistes installés dans la vie un
pas
peu
tout à fait installés c'était parce que tout était tu sais à cause de la guerre tout a été en retard
c'était tout était bous-
boulversé alors euh je veux bah maintenant tu me demandes et et moi je constate j'ai pensé aussi que j- nous sommes venus en vingt-deux ans ici dans
c'est bon
et donc voilà vous voilà prenant le train avec quelques économies quand même
avec euh pff je me rappelle plus du tout comment
ouais
parce que dans le temps vu les sans argent mais tout de même oui oui c'est l'a- l'a- l'a- on avait l'a- l'argent de cette
de cet- cette
de cette toile de de cette toile
toile oui d'accord
qui avait été vendue à un à un
là-bas
prix
un prix qui
si elle a elle a
déjà
payé un prix que bon pour on a pu tout de même vivre
oui
les premières mois
ici
et
et alors c'était
et
où
on s'est arrêtés parce que tu sais c'est
quatre ans de guerre c'est c'est terrible
et tout était
à Belgrade gris et
ruiné les ru- les choses affreux
et
nous nous sommes arrêtés à Venise nous descendus du train à Venise
et c'était le rêve bien sûr
oui
après
avant bien sûr nous sommes venus en train d'accord
et
à en arrivant à
à Milano les grands affiches grandes expositions de Van Gogh
alors bien sûr
là c'est le bagage tout de suite c'est
euh
oui parce qu'on pouvait laisser les bagages à la gare en c'
à la gare
ah non
temps-là on peut plus maintenant on peut plus
à cause des attentats les gens ont peur
ah c'est vrai
peut-être pas en Italie mais en France tu ne le fais plus
je ne savais pas tu vois je
bon mais c'est des c'est des bêtises
que je te raconte mais
ah je savais pas
ça ça ne serait plus possible
non non ça non /là,la/ le
en France
c'est le euh le bagage(s) c'était le matin on est allés le plus tôt possible c'était la une merveille et après
après
de la gare de Lyon
comme on avait
déjà pris le plan de Paris bien sûr et donc on connaissait Paris
Paris comme ça des livres des
cartes des je sais pas quoi de tous les histoires et tout et
et et Vlada a voulu aller à
directement Gare de Lyon Etoile
et c'était
une fête
ce jour-là
tu veux dire que
parce que
vous aviez nan vous aviez laissé les bagages à nouveau
les bagages
gare de Lyon
de nouveau
oui
là oui mm
pour aller
à l'Etoile direct
et il y avait une énorme dra- un énorme drapeau qui
qui était sous sous l'Etoile
et et en p- en plus moi c'était la première fois que j'ai j'ai vu quelque chose
de énorme
oui
une porte
grande comme une grande maison une très grande maison j'étais vraiment étonnée fascinée
après on j'ai ch- j'ai choisi parce que j'aime
la Seine on ha- on habitait
un hôtel
un hôtel rue de la Bûcherie
sur la Seine qui donnait
juste
et de comment dire l'hôtel donnait sur la Seine était la deux- la d- c'était pas sur les quais c'était la première rue qui
tu sais tu sais où elle est la rue de la Bûcherie
euh c'est à par rapport à Saint-Michel je
après Saint-Michel
sais plus si c'est oui
c'est
à à l-
c'est quand on va vers Saint-Séverin mm
le le long le long de la place
Notre-Dame
ça commence
d'accord
ah
euh
oui oui
je sais pas comment s'appelle Saint-Jacques rue Saint-Jacques
oui oui
et jusqu'à la fin de
de Notre-Dame
alors l- nos fenêtres donnaient sur
Notre-Dame
c'est merveilleux
c'est d- c'est un hôtel
allez
modeste
ouais
long dans les
couloirs le le water pour tout le monde
ouais
pour tout le monde deux waters je crois quelque chose comme ça mais c'était
par mois payé par mois
voilà
et après
après
et vous connaissiez des Yougoslaves euh à Paris ou vous étiez seuls euh
on (n') était on ne c- euh
on connaissait ah oui oui le le
Vlada avait l'oncle euh qui vivait à Paris depuis d- des années marié avec une
femme
française
avec une fille
peut-être que c'ét- ils nous ils nous ils nous n'ont pas attendus
mais je crois qu- ils sont ils sont pas sortis à la gare mais euh on
vous êtes allés
dîner
on
il fallait on ils ont dit qu'on peut dormir chez eux
pour trouver l'hôtel pendant que pendant quelques jours comme ça et bon
après on a trouvé cet hôtel
après
mais ça c'était
donc des conditions de vie minable(s)
tu étais pas habituée à ça
oui je sais pas comment te dire non c'était la vie était tellement minable
à Belgrade
tellement dure
la guerre et tout ça ça c'était horrible comme ça tu descends tu suffis de voir Paris les femmes par exemple
euh avec les
pff vestes rouges ou jaunes ou je sais pas quoi que là-bas tout était
/qu-, c-/ décoloré et c'était
c'était gai pour nous
et
tu avais cette impression de fête en arrivant à Paris
oui
absolument tout de suite
tout de suite c'était la fête
d'abord cet ce énorme drapeau tu peux imaginer le drapeau jusque je crois que jusqu'à la terre et mais je ne sais pas quelle fête Vlada peut-être sait
c'était pas le quatorze juillet mais
quand tu es arrivée tu parlais français déjà
oui
c'est le français de l'école
un peu euh
à l'école bien sûr on appren- on a- apprenait le français officiellement le français et allemand
et mais moi j'ai
j'avais des leçons de j'avais une Française
qui a qui m'a donné des leçons
une Française qui venait comme ça chez nous
qui me donnait des leçons et aussi l'anglais
mais l'anglais pour moi c'était plus facile après bon c'était pff mais je me débrouillais je me débrouillais
parce que tu as un français
mais c'était un autre français
parce que
ce que tu apprends ce n'est pas
acheter les les choses dans les boutiques
c'est tout de même l- une langue
différente
comme maintenant
par exemple pour moi
c'est très difficile de suivre
quand les enfants parlent
c'est quelques fois difficile pour les parents hein
mais
oui donc ça ça
c'est une langue
m'explique je me suis
un peu spéciale
toujours demandé pourquoi ton français était de si bonne qualité
que
donc c-
de très bonne qualité tu as
un français
moi
oui très châtié très
ah oui parce que mon père insistait mon père était très mathématicien alors il voulait les précisions
et toujours il me
euh me demandait les choses par exemple
des
des-z-verbes de temps de choses comme ça il fallait que je dise mais ça finalement bon ça a servi peut-être je sais pas pourquoi mais ça n'a pas servi beaucoup après il fallait apprendre mais à l'hôtel nous avons
trouvé tout de suite
euh des jeunes des amis sympathiques
des
un couple par exemple
un étudiant roumain
avec s- et marié avec une Française
ils habitaient dans une chambre on habitait l'autre mais elle avait sa mère était première main chez Dior
mm mm mais en même temps ils n'avaient pas assez d'argent pour trouver autre chose qu'une chambre d'hôtel
oui il(s) avai(en)t pas bon il(s) avai(en)t pas d'argent
peut-être
la la mère n'était pas contente qu'elle se
qu'elle-z-a choisi un roumain sans
d'accord
sans fortune
je ne sais même pas de quoi ils vivaient
ah je sais pas parce que les Roumains en ce moment étaient assez riches
il y avait une église roumaine
euh là en haut de de la place Maubert
Maubert
et
et lui il allait toujours il
on lui donnait des
des tasses des tasses de café des je sais pas des tas de choses les Roumains et
et elle
elle faisait les écharpes
et moi j'ai commencé à f- travailler avec elle
ouais
sur la soie
comme ça là maintenant
comme ça là dans le temps
oui nan elle peut plus maintenant malheureusement
euh le temps elle t- elle t- elle travaille pas
elle tremble trop elle
tremble trop elle ne contrôle pas sa main
ah oui ah oui
pour le moment
et je me rappelle oui je me rappelle que on a travaillé
et
euh cet ami roumain il est allé
euh pour montrer tu sais la librairie Shakespeare
mm mm
et bah ça c'est rue de la Bûcherie
d'accord
c'est à côt-
alors je
vois très bien où c'est
voilà voilà
et de temps en temps ils je sais pas comment mais il il exposait des écharpes il vendait les écharpes je ne sais Vlada après elle a il a trouvé parce qu'il y avait des émigrés je crois il y avait quelques émigrés
ah oui il y avait un ami
qui était professeur
marié avec une Française il était professeur à la Sorbonne
il donnait des leçons
de serbe et on a co- on a connu
et
et je crois que Vlada a fait
Vlada est ah oui parce que nous sommes venus avec les Rabanovitch
en même temps
nous quatre
c'est-à-dire le d- deux jours avant
avant le
et il travaillait à la peinture bâtiment
pour vivre
d'accord
moi j'ai fait
des écharpes
et Vlada
mais
aussi
a fait
si
alors attends
euh il faut que
oui ça marche
en tout cas c'était
merveilleux
je me rappelle pas la seule chose que je me rappelle le problème c'était de prolonger le visa chaque
je sais pas combien est-ce que c'était chaque trois
semaines ou chaque trois mois je me rappelle plus
ah d'accord c'était
parce qu'il y a longtemps
et c'était difficile déjà en ce temps-là
et c'était difficile oui et après bon j'ai l'impression que tout de même et oui on nous a dit toujours que les Français sont pas faciles à contacter ils euh
et pour nous c'était pas du tout
ça alors tout de suite ils euh
comme ça voilà par par
par exemple voilà la la
la la
tante
de Vlada était française et c'est c'est c'est un
ah oui
c'est un
milieu un type mariée avec un français à l'hôtel il y avait la
et donc ça vous a fait un réseau de Français au-delà d'eux
parce que
oui
c'est un peu spécial
et en plus
c'est toujours
cette
mariés
Française qui faisait le
la la couture
qui faisait la
ouais
la peinture
et
elle elle euh j- euh jouait à la guitare et tout de suite on a appris les anciens c'est-à-dire appris pas nous nous n'avons pas chanté mais les /ph-, f-/ les
elle chantait les
chansons de Moyen-Age et c'était vraiment
extraordinaire et d- du Moyen-Age et tous les chansons populaires
oui
parce que je crois
je sais pas qu'est-ce qu'il s'est passé avec son père
est-ce qu'elle a j'en sais rien elle était seule
et
qu'est-ce que je voulais dire à cause de ça
non tu parlais des chansons
oui oui
chansons
parce que c'était euh tu sais il y a tout de même
des f- des femmes spéciales dans la mode sa mère était
très belle très coquette la tante chez
la tante chez Yves Saint Laurent et la mère
chez Dior première main enfin bon
donc ils savaient coudre des habits jolis
hein
et elle et c'était c'était comme
Anastasia et Bettina la mère était pff comme ça et l'autre la fille qui s'est mariée avec le Roumain elle était adorable mais les autres étaient adorables aussi mais coquettes mais elle n'était pas coquette du tout
elle était très simple
elle
ça je c'est vraiment le souvenir
et pourquoi vous avez quitté ce quartier comment vous êtes arrivés alors euh dans ton
ah ici
quartier oui
après mon frère est venu
à Paris
ton frère est architecte
mon frère architecte
et il est venu à Paris et à ce moment-là on on
euh comment dire on a restauré Saint-Malo et on avait besoin beaucoup de de d'architectes et on a téléphoné à à mon frère parce que des autres jeunes et un architecte qui est venu
et il est venu pff il a travaillé à Saint-Malo
plusieurs mois je crois tout de suite en venant
en venant le s- il est venu le soir à la gare de Lyon et il est
parti avec le travail mm mm
parti le len- le lendemain
matin pour vraiment
et il a c- il a connu
euh il était très ami avec
les les jeunes architectes
oui
et un des jeunes architectes était Teyssere
d'accord oui
et et et ici il y avait une dame qui habitait une peintre
elle est morte et ici l'a- l'appartement était plein des des c'était les beaux-arts vraiment il a
accepté tous les les jeunes de venir ici c'était l'atelier des des étudiants et après il a dit à mon frère de venir
de lui donner une une chambre après il nous a donné à nous une chambre à pourquoi à l'hôtel pourquoi vous venez pas et après
sa mère a décidé de nous donner l'appartement
d'accord
et depuis
de vous louer
pas de vous donner
pas de nous donner mais écoute parce que
oui
tout le monde
a voulu le louer
oui
mais bon
d'accord
et on pes- enfin enfin on payait un peu la comment dire
pour rentrer
oui
tout le monde
paie pour rentrer alors nous aussi je me rappelle plus du tout
oui
il y a trop longtemps
et je sais qu'on a payé on payait le loyer et il a dit
comme vous êtes peintres vous vous occupez de l'appartement je
on ne fait pas de dépenses pour le
pour le mettre en état
pour le mettre
le rénover
en état
et bon
alors c'est après
et ça te plaisait de changer de quartier
non
non hein tu aimais la Seine et
j'aimais la Seine
ses quartiers
et ici
ça m'a paru
normal pff j'étais pas mais d'abord on a habité
euh dans des chambres et tous les toutes les
les jeunes architectes travaillaient ici dans l'atelier bon
ah oui vous n'aviez pas non plus d'intimité alors
oh bah c'était très court
très je me rappelle plus de combien ça a duré mais très peu
peut-être un an ou même pas
j'en sais rien je me rappelle pas de ça seulement euh c'était sympathique
très sympathique et après on a eu ça et Vlada a fait la
il a peint l'a- l'appartement
d'accord
et ce quartier c'était quand même euh le Montparnasse euh d'après-guerre c'était
c'était assez vivant il y avait plein d'artistes
ah oui oui oui ah oui
d'artistes
non
il y avait ça aussi
nous avons euh eu euh nous avons eu Vlada a eu l'atelier dans le l'Académie de Sciences dans la coupole de l'Académie de Sciences
c'est pas vrai
à Belgrade
oui
il a eu
oui oui oui
parce que c'était
moitié en ruine oui mais mais
ah d'accord mm
mais tout de même
on a on a été là-bas et à côté de nous il y avait un sculpteur celui-ci qui a fait cette sulpture
qui était très ami de Zadkine et après comme nous sommes venus on a découvert Zadkine ici c'était
arrière Notre-Dame de
oui
non
rue d'Assas
oui
et
et comme ça il y avait bon il y avait Beckett il y avait Ionesco
tu as connu Beckett
si
tu l'as connu Beckett
oui oui j'ai connu Beckett parce que Bettina
son mari était premier éditeur
de Beckett
d'accord
John
mais connu d'amitié ou comme ça de loin vous êtes devenus amis
bof amis je ne sais peux pas dire amis
bon ben on se voyait à de temps en temps à
à la
à la Closerie des Lilas
Closerie des Lilas
oui
parce qu'à ce moment-là il venait tout le temps à la Closerie
les autres venaient
les autres
à au Dôme par exemple Ionesco était toujours
oui
et
et /c'est, ses/ comment sa
sa femme et bon
après le
ils ils se faisaient le rendez-vous à
au coin de Simone de Beauvoir et
et Sartre
et Sartre
mais donc ça c'est un monde qui t'a plu qui t'a
qui t'a intéressée ou au fond
tu étais ailleurs tu t'en fichais un peu
mais non parce que tu sais quand tu viens
de quelque part
oui
tout est
intéressant et c'est tout de même quelque chose
c'était des gens spécials et en plus c'était des gens
très spécials et Beckett et Zadkine et Ionesco c'était des gens
vraiment
donc ils venaient chez vous de temps en temps
ou c'était à une vie de café plutôt
c'était c'était
on on allait chez Zadkine je crois que c'était samedi qu'il recevait
ouais
et avec Beckett c'était la Closerie des Lilas et l'autre ben finalement on allait
on sortait
oui
on après bon après il y avait beaucoup de monde qui venait chez moi
c'était facile à ce moment-là bon
d'inviter les gens
et après
mm il y avait quand
Vlada eut la galerie
rive gauche
euh on a connu aussi beaucoup de
de peintres par exemple
Dubuffet
Dubu- Dubuffet ou Jörg il était dans la même galerie que Vlada
oui
ici
rive gauche
et comme ça les
donc ça ça s'est fait
après
vite
oui on a vu que
euh c'était les Français euh
bien sûr les serbes aussi invitent les gens à la maison
mais
comment dire
irrégulier le matin le midi le soir n'importe quand et ici c'était les dîners
oui oui oui
on (n') arrive
pas à l'improviste
on (n') arrive pas à l'impro-
chez les gens
à l'improviste et puis quand c'est le dîner c'est presque
un spectacle
et comme ça moi j'ai
j'ai décidé de faire
parce que
c'est
c'était tout de même on entrait tout de même dans
dans un monde
qui s'intéressait de l'art
qui était dans l'art alors c'était tout de même des gens un peu spéciales
et les femmes
de peintres
s- sont je peux dire merveilleux
les femmes tous les femmes de peintres c'était des femmes extraordinaires
tu veux dire que elles tenaient le moral des
ils tenaient le moral
des maris
ils étaient
euh accueillants ils étaient t- tolérantes des
des maris ils
je sais pas comment dire un monde
mais toi tu étais un peu à part parce que tu es femme de peintre mais tu es d'abord
peintre
non j'ai été peintre
j'ai Vlad- parce que Vlada ne supporte pas il a tout de suite voulu que j'expose quand j'ai mais après après j'ai laissé comme ça j'ai travaillé mais j'ai pas exposé
beaucoup et
parce que
je suis lente et
Vlada bon il avait ses ses galeries
et donc Vlada
donc c'était c'était
vous êtes arrivés en cinquante-deux tu as dit
c'était
et Vlada
a commencé à avoir euh cette galerie rive gauche assez vite
il a fallu quelques année de de vaches
ah non non
enragées
il f- il fallait bon
il fallait tout de même
je ne sais pas dire exactement
quatre cinq ans six ans
donc il y a eu six ans très durs quand même
oui
mais dont tu gardes
non mais
pas le souvenir
de ces
mais ça je le oui
parce
que par exemple il faisait la peinture
bâtiment
oui
après il faisait par exemple
euh Krief
était ami de
Claude Krief
tu sais le
le Claude Krief
le journaliste
le journaliste
oui
était
a- a-
après ils ont connu Charles
oui
dont le Vlada et
et Pierre ils ont connu ça et
et Claude Krief a
comment c'était eux ils ont habité l'hôtel et ils ont fait connaissance avec
beaucoup de peintres de cet hôtel à comme c'était
c'est euh
mm
rue rue Monsieur-le-prince ou quelque chose comme ça mais comme nous rue de la Bûcherie c'était
des hôtels très pauvres et
aussi groupés là c'était
comme ça des
des peintres
et il y avait
des peintres qui étaient plus âgés un peu
et qui ont
bon estimé est aussi très bon peintre
et Vlada est tombé comme ça avec
avec Jörg
oui
Dubuffet
et Vlada quand même avait à Paris beaucoup de notoriété hein à un moment donné hein
c'était un des bons peintres de l'école de Paris
ouh oui non non non Vlada a toujours il a toujours
exposé il a d'abord exposé
rive gauche après Jean Buchet et
oui
et
et le
et Aregal
mais maintenant c'est un peu la crise /de, des/
de la peinture
un moment il y avait la crise
terrible dans la peinture parce que les prix
les galeries faisaient des prix vraiment énormes
mais ça je crois
ça a dû être vingt
une vingtaine d'années euh que la peinture était très
comment dire
estimée
oui
et puis il y a eu un moment où le marché s'est un peu déplacé de Paris à New-York
euh non c'était beaucoup beaucoup plus tard
non ça vous n'avez pas s-
oui ça vous n'avez pas
souffert peut-être
oui oui après nous sommes allés ailleurs
ah mais oui c'est vrai
nous sommes allés à New-York en soixante
mille neuf cent soixante
cinquante-deux soixante
c'est vrai
tu vois c'est rapide
maintenant je pense oui oui ça ça n'a pas duré
si longtemps
parce que quand nous sommes allés à New-York Vlada avait déjà
galerie Arial il a passé par rive gauche et Jean Buchet il était
oui
donc ce quartier
pour revenir à mes quartiers de Paris tu tu y es allée parce que c'était commode mais tu ne l'as pas choisi
et maintenant
tu l'aimes ou tu
ce quartier
ah ou- maintenant j'aime oui après j'ai- j'aime beau- maintenant j'aime beaucoup mais je j'adore
les quais
les quais de la Seine mais ici c'est tout de même
euh comment dire
tout près de
de Luxembourg la Closerie des Lilas je
oui
maintenant maintenant
ce que tu aimes c'est le
maintenant je suis
Luxembourg en fait
dans le Luxembourg je
oui
j'aime
beaucoup mais je vais jamais
c'est-à-dire je passe comme ça par le Luxembourg mais je suis pas de ceux qui
et
qui
justement
ce quartier tu t'y promènes euh tu
ou ou en fait tu sors du métro et tu rentres chez toi
maintenant
oui mainten- ou en général tu as vécu des années des années là qu'est qu'est-ce que c'était ton
oui c'était
ton espace à toi
on faisait c'est pour ça j'ai
dit le les
euh ici
euh c'était
on était invités à dîner
chez des chez eux chez l'autre comme ça et après il fallait que
rendre les dîners
il fallait
rendre ça
et c'est pour ça que je te dis
c'est à la maison beaucoup beaucoup de monde
même mais on s'est trouvés dans
par exemple au Select parce qu'au Select à ce moment-là n'était pas un café
euh mondain c'était ben disons que la Closerie des Lilas était un peu mais mais bon
c'était pas mondain à ce moment-là
ni la Coupole par exemple après les
ouais ouais
vernissages
on allait à la Coupole parce que la Coupole est grande on peut
être quarante à dîner
mais
c'est drôle
c'était c'ét-
je ne t'imaginais
pas comme un pilier de café
je ne savais pas que tu allais beaucoup dans les cafés je te voyais pas
comme quelqu'un qui avait aimé la
non non j'étais pas je n'étais pas beaucoup
les cafés la vie des cafés
dans les cafés
mais
c'était
c'est on se
le rendez-vous
des amis
c'était très oui c'était très facile
oui
parce que
tout le monde n'avait pas euh on venait chez nous
mais tout le monde n'avait pas euh des
de l'espace
des appartements
et des ateliers comme ça et
euh
bah mais comme maintenant les rendez-vous c'est toujours dans les cafés
c'est vrai
oui oui oui et sinon le quartier
mais là-bas par
oui
exemple
quand
quand je suis venue
c'était absolument inimaginable je j'ai jamais allée dans un café
c'est mon grand-père qui allait dans le
café
quelques fois et même pas
oui
souvent
et où on nous invitait par exemple dans les restaurants à manger
et quand je suis venue à Paris ici
ah je me suis dit mais comment c'est possible
que les jeunes vont dans des cafés parce qu'il fallait avoir de l'argent
mais c'était pas
écoute le café était très bon marché mais tout de même le café
et j'ai dit comment c'est possible parce que pour de mon avis
c'était
que les vieux qui vont dans les cafés
les jeunes je sais pas
c'était jeunes vieux c'était pas hommes femmes
le café n'était pas interdit aux femmes c'était un problème d'âge
problème d'âge
oui
d'accord
voilà tout d'un coup
je pense à ça mais j'ai complètement si tu m'as pas demandé je
de temps en temps j'ai des des des comment dire des images de tout ça mais
maintenant puisque tu me demandes je me rappelle de tout et je vois que vraiment
on avait de la chance
d'abord de dire de
de vivre
ce Paris vraiment
mm tu l'as vu
changer
quand quand est-ce que ça a commencé à tout à l'heure tu me disais que
que tu es saisie par l'angoisse des gens et la tristesse et quand est-ce que tu dirais que ça a basculé ton Paris
euh de jeunesse pour euh
cette ville
qui souffre
je ne peux pas te
je ne peux pas dire
des années je
quelques fois je pense que
ça s'est passé il y a
euh une fois on
on me
dit
euh je j'ai fait une exposition et après ils m'ont invitée
de nouveau à faire je sais pas une exposition spéciale
avec beaucoup de tableaux
dans un salon
et moi je dis mais c'est gentil puis vous vous m'avez pas oubliée il y a dix ans que j'ai
il y a dix que j'ai exposé elle dit comment dix ans trente-cinq
ah
c'est pour ça je te
oui
dis
l'âge pour euh les années ça
je n- je n'ai pas le
souvenir exact de
je sais t- je sais seulement qu'on est allés
soixante à New-York première fois
qu'on est allés
mais vous n'avez jamais pensé vous installer définitivement en Amérique
euh
vous étiez
non non Vlada était bon j'étais fascinée par New-York
aussi picturalement
et mais
j'ai jamais euh pensé d'habiter à New-York Vlada était
très
plus tenté
tenté plus beaucoup plus tenté
mais à ce moment-là voilà c'est pour ça je je me rappelle que c'était
déjà c- déjà il avait cette galerie
déjà il avait oui il ét- il était chez Polack
et alors euh
oui tu es quoi au bout de toutes ces années
d'abord parisienne
euh en même temps un peu serbe euh beaucoup
française au bout du compte je sais même pas si tu as la nationalité française peut-être que non
j'ai la
oui
nationalité
parce que aussi nous entre tous ces peintres et tout ça
nous avons connu un un ami qui était la possibilité de nous donner le mais il y a longtemps il a dit ah parce qu'il savait que nous avons beaucoup de problèmes pour les
les visas
les visas alors il dit pour
pour nous maintenant ça simplifie
euh que qu'on
que vous prenez la nationalité française
alors ils nous ont donné je n'en ai même pas demandé
oui
ils nous ont donné la nationalité française
je peux pas te dire quelle année
bon c'est
c'est pas grave c'est ça change rien
euh et tu pouvais garder également la nationalité
oui on a fait
yougoslave
oui on a pu garder la
d'accord
ah je me suis
finalement
comme ce que tu me demandes comment je me sens
je me sens ah je ne peux absolument pas
j- je vis ici je ne peux pas
changer
oui
maintenant
je vis ici beaucoup plus que là-bas
mais
je ne peux p- je je suis tout de même serbe
mais
et j'ai
par exemple je j'ai jamais voté
ah tu n'as jamais voté
ni là-bas ni ici
jamais
parce que
je trouve que
je suis t-
je trouve que
les Français avec moi j'ai
que des
comment te dire louanges pour les Français pour la comment on était là comment on était accueillis comment
tout était
bien
et après la la crise a commencé dans les
dans les de l'art
à cause de
oui
ces
oui
les problèmes de galerie et des des
collectionneurs
mais
euh je sais pas pourquoi je te dis ça parce que
euh je me je ne me sentais pas
le droit de voter
je
ni en Yougoslavie parce que je n'étais pas je ne sais pas pour qui voter
oui
je ne voulais pas
mm
tu n'es plus dans cette vie là
parce que tu te sens extérieure maintenant
euh là-bas je ne savais pas
quand j'étais en Yougoslavie mais j'ai j'ai eu le temps de voter
oui
j'ai pu voter
mais j'ai jamais voté là-bas
et ici aussi je n'ai pas voté parce que
j'ai tout de même
je trouve que c'est formidable que les que tout le monde
euh ce soir on va
on va bientôt arrêter mais je veux juste que tu termines
ce que tu disais
parce que j'étais complètement
étonnée tu as dit je ne vote pas
ah oui oui
et
et
ah oui oui
et tu
voilà
le droit
de vote ça parait
j'ai le d- je ne suis pas
quand même quelque chose de fondamental
du tout quelqu'un
qui aime la responsabilité
je suis quelqu'un qui
qui accepte les choses
qui voit
les choses
mais
je n'ose je n'ose pas du tout
donc
le ch-
décider
oui
je
mais
tu as des
je décide c'est
opinions politiques
pour ça que
par
exemple la la peinture me convient
parce que je fais ce que je veux
oui
je n'ai
pas obligé d'exposer je
mais
tu as des opinions politiques
ah j'ai des opinions politiques
ah mais d'abord j'ai été
terriblement déçue en Yougoslavie
ouais
parce
que
euh
moi j'ai pensé que
oui
que le communisme hein
vous vous avez vous étiez
jeunes au moment de la guerre et vous avez été engagés en tout cas Vlada très engagé
bah oui Vlada a été engagé on était
on
on pensant que le communisme c'était d'idéalisme merveilleux tout
oui
et après on a vu que
Tito était tout sauf communiste euh le plus grand luxe le p-
pff
mais il y avait sûrement
des bonnes choses euh comment dire dans dans l'organisation il y avait pas
euh par exemple
il y /a, a-/ avait comme en France ça existe
euh ce que ce que
comment dire on a
on a les
l'aide de l'Etat tout le monde peut travailler tout le monde peut étudier tout le monde
ah c'est c'est l'Etat
ça ça a été
tout de même
installé par les communistes
ça a été
oui
oui
mais c'est ça
et ça bon après De Gaulle a installé ic- j'ai euh
j'ai
oui
compris que c'est De Gaulle
si /je, j'ai/
euh
c'est
qui a fait
le premier les euh
quoi
le
les retraites pas les retraites qu'est-ce qu'il a fait
euh
l'aide
écoute il m- alors c'est
les je crois que les le
l'aide dans les hôpitaux
non la Sécurité
les maladies
Sociale
c'est plus ancien
c'est
écoute je ne sais plus
j'ai honte de ne pas savoir mais je pense que c'est
il y a eu le Front Populaire aussi donc
en trente-six quand même il y a eu beaucoup de lois qui ont
je ne sais
je ne sais pas
mais j-
je j'ai comme ça entendu
mais
et bon
d'accord
et
et après
euh
je n'étais pas du tout
(j'ai je)
j'avais des amis de tous les côtés
mais je n'ai jamais comment dire fait
fait la différence
parce que on (n') était p-
je ne sais pas mon père
était p-
politique il était
blessé dans la guerre de quatorze on a même on a écrit dans les journaux
euh comment dire
gloire aux aux soldats morts pour la patrie
on et finalement on l'a ramassé il était vivant et bon
et il était
dans la politique
il /s'est, s'ét-/ il s- était au courant
toujours
de tout
mais après
quand le titisme est venu
ce n'était pas ce qu'on a
imaginé
et mes amis qui étaient par exemple
super idéalistes communistes parce que moi je n'étais pas politisée
tellement
mais /j'ai, j'é-/
j'étais toujours pour l'égalité pour le les choses de de gauche finalement
mais ce n'était pas tel-
exactement ça
et du coup ça a tu étais trop déçue pour t'y
et moi je
intéresser en France
je n'étais pas sûre de rien
et je
et comme je ne
je ne connaissais pas suffisamment le